J'avais cru en Dieu pour la première fois lorsque mon père de confession catholique et ma mère née sous le protestantisme m'avaient inscrit à l'Eglise Réformée pour "faire ma communion". Sans doute le pasteur connaissait-il suffisamment Dieu pour que je sois moi-même amené à le prier et à voir durant ce temps de ma pré-adolescence de nombreux exaucements à mes prières.
Mais il fallait plus qu'une préparation à la Communion pour tenir dans cette relation véritable possible avec le Ciel. Ce passage "obligé" accompli, je ne trouvais pas plus de raison de continuer à aller à la chapelle du quartier que mes parents qui s'étaient mis à passer leur dimanche matin à étudier les chevaux de course et à parier sur eux. En plus je jouais au foot en club et les matchs se jouaient les dimanches matins. Mais je priais, et on gagnait des matches perdus d'avance…
Et puis il y eut un effet tsunami avec l'entrée en 1ère. Avec la philo c'était un professeur qui se déclarait volontiers marxiste-léniniste qui se chargea de poser pour mon édification un fondement selon sa vue partisane et militante. En moins de deux ans, appuyé par Marx, Engels, Nietzsche, Sartre, Gide et autres Camus ou Russell… il avait fait de moi un athée. En tirant sur "l'opium du peuple" il avait du même coup tué Dieu en moi et j'avais selon l'expression américaine "jeté le bébé avec l'eau du bain".
La politique ne m'intéressant en fait pas du tout, je me libérais de mon mal-vivre hanté d'une timidité maladive en suivant les modes particulièrement anticonformistes de ces années 60, m'habillant les joues de pattes à la Elvis Presley ou Eddy Mitchell, portant pantalon-à-pont ou patte-d'éléphant issus des stock US, chemises à fleurs comme Antoine, manteau lèche-poussière et grand feutre noir quand sortirent les films western-spaghetti ("Le bon, la brute et le truand"…).
***
En mai 68 j'étais en fac à Grenoble quand la tempête enfantée par les vents musicaux et d'autres marginalités joignit les étudiants à une vague d'ouvriers mis en colère conformément à la lutte des classes.
Plus enclin à la poésie qu'au Droit et à la photo qu'aux barricades, c'est dans le labo-photo déserté d'une résidence universitaire que je mis le pied à l'étrier de ce qui allait devenir ma passion et mon métier.
Sans argent, ma grand-mère me payait un Icarex (mon premier appareil photo "reflex" !), puis, vendant mes premières photos, je peux m'acheter mon premier Pentax - un bonheur !
Par un concours de circonstances le monde insoupçonné du sport automobile s'ouvre à moi, et en quelques années je deviens photographe officiel de courses et correspondant-reporter de presse spécialisée.
Je me fis là parmi pilotes anonymes et célèbres une (belle) clientèle, trouvant sur un bord de route une (jolie) fiancée, et après la zup chambérienne des débuts on achetait une grande villa que vint rapidement animer la naissance d'un garçon.
Une vie qui aurait pu être un pur bonheur! Une existence sans contraintes perçues, comme si on pouvait être naturellement heureux.
Mais un des aspects de notre condition est que ce n'est bien souvent qu'après l'avoir perdu qu'on réalise (mieux) la qualité, la valeur, les vertus, le bien… de ce qu'on avait!
En quoi cette tranche de vie aurait-elle pu contribuer à ce que je me pose des questions, des questions essentielles, qui malgré les études, la philo, n'étaient encore jamais montées en moi. Le bonheur ne m'apparut pas interrogatif. Quelquefois il m'était arrivé d'avoir une vraie peur de mourir, mais là tout était dissipé - malgré le risque parfois important que je prenais pour faire des photos spectaculaires.
J'existais, ça fonctionnait, bien que la perfection ne fut pas de ce monde. Il aurait semblé que rien ne nous manquait. Mais malgré tout ce qui m'occupait, je restais insatisfait et comme je ne trouvais alors rien de mieux que la femme et le plaisir que donne son intimité, il en entrait bientôt une autre dans ma maison, avec son enfant, le consentement de tous… et des problèmes qu'on aurait été bien loin de soupçonner!?
Ce fut merveilleux... pendant quelques mois.
Cette femme était médium et introduisit comme un jeu le pendule, l'invocation des esprits et des morts au milieu de nous. L'attrait n'était pas énorme mais ce don n'est pas sans quelque force maligne à qui on donnait - bien inconsciemment - un droit sur nos existences.
C'est au point où rapidement on en arriva à faire un testament (au profit de cette femme) qui en fait déshéritait notre propre fils!
Puis quelque chose comme la rivalité, la différence de statut, voire la jalousie commençèrent à égratigner le vernis des débuts. Je ne supportais bientôt plus l'enfant et des colères contre lui faisait sortir des griffes. La tension montait, et un jour un grand couteau de cuisine apparut, avec menace de se supprimer, elle et son enfant, enfermés dans une chambre.
J'appelais Police-secours et des pompiers vinrent aussi apaiser la situation.
J'avais réellement tremblé, un vent de folie faisant claquer les portes ayant parcouru toute la maison.
Certes on peut faire beaucoup de choses dans nos maisons, mais attention à nos pratiques qui enfreignent des lois de la vie*. Attention à ne pas y laisser entrer des entités de ténèbres - bien vivantes, voire puissantes...
Sans le savoir, on avait approché là un aspect subtil de ce qui peut attenter à notre paix, voire à nos vies… alors même qu'on avait cru amorcer un chemin de mieux-vivre… C'est que la séduction est bien souvent la première face du mal.
Le clash avait été si conséquent qu'on eut envie de changer de ville...
* LES 3 PORTES D'ACCES à la PRESENCE DE DIEU
Non, le bonheur n'est pas par tous les moyens: il y faut les justes ingrédients et de justes proportions, et j'étais loin à ce moment-là d'en imaginer même la configuration générale.
On allait donc trouver une nouvelle maison, mais sans encore savoir ce qu'il y avait à corriger dans notre conception du monde, et dans nos comportements... l'un étant souvent bien intimement lié à l'autre.
***
Ma femme l'avait aperçue, magnifique, à vendre dans la ville voisine. Voilà comment se passa son acquisition.
En regardant la maison à travers la grille de son portail, plus vite que toute pensée était sorti de ma bouche ce qu'on appelle un vœu! C'était comme si je m'entendais dire: Si on peut acheter cette maison, je donne 1500 francs à une église !
Jamais je n'avais parlé ainsi, et c'était d'autant plus surprenant que mes pensées étaient toujours alors bien loin de tout rapport avec la religion.
Et voilà qu'avec un crédit qui ne nous étouffe pas, cette belle maison se trouve à notre portée! Miracle !?... Je donne la somme "convenue", "promise" - à qui!? - à un curé de campagne qui n'en revient pas ! (l'équivalent à l'époque d'environ un salaire mensuel minimum).
C'est ainsi qu'on emménageait cet été-là, curieusement… rue de Lafin! Pouvait-on éviter de se dire: C'est peut-être la fin de quelque chose !?...
On se retrouvait tellement bien que ma femme devint enceinte!
…Mais ce qui avait été un vrai bonheur - devenu un fils quatre ans avant, semblait ici un "accident", une bien mauvaise nouvelle, qui ne s'accordait pas du tout avec notre plan de vie. Aussi il n'y eut pas beaucoup de discussions avant que l'on décide de "le faire passer". Je m'en offusque encore en l'écrivant. Mais alors, la conscience bien obscurcie, nous n'avons regardé que nos activités, notre confort, liberté… alors qu'on entrait à trois dans une immense maison...
La conscience obscurcie nous empêche aussi de faire des rapprochements précieux, de voir des relations de cause à effet essentielles. Quand peu après, accélérateur bloqué, un bolide fou sort de la route et grimpe un talus jusqu'à s'immobiliser sur les pieds de ma femme… qui pense à voir un rapport avec un avortement?
Et quand quelques semaines plus tard, en pleine nuit, une voiture de rallye tire tout droit dans un virage s'envolant pour s'écraser en contrebas dans un bruit sourd? J'ai appelé ma femme qui se trouvait juste sur la trajectoire. Deux, trois fois. Pas de réponse, mon cœur panique… quand elle finit par m'appeler. J'en peux plus, j'en ai marre de ces galères où on travaille sans plus savoir pourquoi, les pieds mal chaussés dans la neige pendant des nuits, des batteries de phares longue-portée dans les yeux toutes les minutes pendant des heures, la pluie cette nuit-là perdus au milieu de nulle part dans la campagne ardéchoise. Les deux pilotes s'en sont sortis; je remballe mon matériel ne finissant pas pour la première fois un reportage.
Hasard? Causalité? Depuis il a fallu demander pardon à Dieu. On a compris ce qu'on déclenche par des choix aussi inconsidérés… On a compris pourquoi le monde n'en peut plus des conséquences de ses égarements.
Mais alors on continuait dans la nouvelle installation.
J'ajoutais aux reportages photo la création du premier magazine mensuel gratuit de la ville, ouvrant une agence de graphisme et de publicité (mon dada depuis longtemps).
Puis ce fut une pensée très forte qui se mit simultanément à s'imposer à nous : On devait réduire les reportages, abandonner les plus lointains! (Je couvrais alors les courses de côte et les rallyes du Jura à Monaco et j'avais revendu mon nom d'agence à un jeune - qui commençait à me faire de la concurrence déloyale, comme j'avais fait moi-même en commençant ! – ce qui me faisait un allié dédoublant ma présence sur ce secteur). Donc l'idée semblait bonne de réduire nos déplacements autour de la Savoie.
Dans la foulée ce fut une étrange succession d'assureurs! Comme s'ils s'étaient donnés le mot, ils venaient m'offrir une couverture sociale plus en rapport avec la dangerosité de ma profession. On faillit bien signer un de leurs contrats, mais n'était-ce pas céder à une peur injustifiée? N'était-ce pas uniquement leur propre intérêt qu'ils cherchaient dans ce démarchage?! Bref on renonçait, pas assez interpelés par les grosses frayeurs récentes, ou trop tenus par l'argent qu'il aurait fallu sortir…
Dans le même temps on s'est mis à réagir à des peurs assez irrationnelles. Face à la crainte d'être cambriolés pendant nos absences, on a fait mettre de lourds volets aux portes d'entrée, et j'ajoutais encore avant nos départs, bien curieusement car je n'étais pas du genre superstitieux, des bâtons posés en croix sur les marches d'escalier pour empêcher quelque visiteur malveillant de les monter. C'était le sentiment diffus d'une réelle menace, comme si une épée de Damoclès invisible qui s'était mise à planer sur nos têtes.
Mais comment savoir que cela avait également un rapport avec cet argent que nous gagnions… et que je soustrayais des sommes portées sur les déclarations fiscales?
Le bref répit hivernal des compétitions avait permit d'avancer les travaux d'emménagement, mais ils étaient loin d'être terminés quand le jour de l'accident arriva.
En fait c'était la première course de la nouvelle saison qui se passait loin, trop loin de chez nous.
On avait hésité avant de nous y rendre ! On se souvenait qu'il fallait en faire beaucoup moins, mais l'idée qu'on laissait le champ libre à la concurrence l'emporta: les signes précurseurs n'avaient pas été assez déterminants pour devenir à nos yeux réellement annonciateurs d'une catastrophe? Dans sa préscience et sa bonté Dieu avait tenté de nous détourner de la trajectoire maligne sur laquelle nous avancions, nous avait alertés sur une vraie menace, sur un jugement que notre comportement avait fini de déclencher quelque part dans des sphères invisibles ignorées… mais dont nous devenons des débiteurs.
La Bible dit à ce sujet que Satan comme d'autres esprits mauvais dans les lieux célestes plaident contre nous devant Dieu dès lors que nous ne sommes pas ou plus sous la protection divine. Que nous soyons croyants ou incroyants - comme c'était alors notre cas, des comptes s'opèrent dans l'invisible, en rapport des lois de religion que nous suivons ou en rapport de nos propres consciences morales. Si nous connaissions mieux ces vérités, nous pourrions être épargnés d'un nombre incalculables de problèmes et de souffrances.
C'est ainsi que faute d'avoir tenu compte des avertissements aperçus, ma trajectoire et l'orientation de notre existence furent bientôt interceptées d'une manière bien sévère…
***
On était sur un rallye en boucle (une ronde) dans le midi de la France, bien loin de la maison. Après avoir photographié le premier passage des concurrents, il était convenu que je quitte ce virage pour me rapprocher de ma femme postée plus bas.
Mais je ne le fis pas! Ce fut comme une force qui me retint à cet endroit du parcours. C'était spectaculaire, voitures presque vrillées par le devers de ce col à la fois en virage et arqué comme un dos d'âne. Passages sur trois ou deux roues, plusieurs sorties de route dont deux ou trois en tonneaux…
Je changeais donc de côté pour me poster à un endroit jugé jusque là trop dangereux, sans échappatoire, juste abrité par un plot de béton qui ne soutenait plus la rambarde arrachée qui séparait du ravin.
A peine quelques bolides étaient passés (parmi les plus puissants) que j'en voyais un venir droit sur moi après qu'il se soit cabré (clic!) sous le choc avec le rocher qui affleurait l'intérieur de la courbe.
Je rouvris les yeux pendant que je roulais, roulais, projeté dans le ravin, voyant le décor défilant comme on les crayonne dans les dessins animés. Enfin arrêté je cherchais mon bras droit que je ne voyais pas. De mon dos je le tirai devant moi… sans savoir qu'il tenait plus par la manche de mon blouson que par la chair.
Et là je vivais un miracle. Je pouvais remonter d'une pierraille escarpée porté par une force surnaturelle, me retrouvant bientôt sur la route avec paix inimaginable, sans la moindre douleur! Je me sentais hyper bien, quelque part incroyablement allégé et comme étranger à l'agitation qui m'environnait, des spectateurs qui couraient presque sous les roues des voitures qui continuaient à surgir, des gendarmes et des commissaires de route qui en oubliaient de signaler l'accident en amont… ce que je leur disais de faire!
Il y avait à cet endroit même une ambulance parqué pour le cas où!?
Après une heure de route pour le dégagement et rejoindre l'hôpital le plus proche, la douleur commença à venir et on m'endormit. Par la suite on me dit que j'avais été bien près de passer "de l'autre côté" après la très longue opération.
Si j'étais mort cette nuit-là, où serais-je, où mon âme serait-elle partie?...
***
Combien on peut ainsi vivre longtemps dans une inconscience sidérante des réalités les plus fondamentales… tout comme si on était immortels!?...
Souvent jusque là, surtout enfant, j'avais eu des peurs de mourir. Mais cela n'avait pas eu d'effet au-delà. Plus grand, étudiant et même marié, je faisais parfois des cauchemars répétitifs, où j'étais projeté dans des scènes funestes: corbillard dans la nuit, cercueil dont je m'approchais… et dans lequel je me découvrais, me réveillant en sursaut et transpiration! Chute dans un puits sans fond; conduite de voiture incontrôlée, sans frein ou en marche arrière; le mythe de Sisyphe, dans des efforts qui se soldaient par un échec, et je recommençais, je recommençais…
Trop symboliques et significatifs pour être de simples effets du hasard ou d'une suractivité de quelques neurones! Mais on ne sait pas! On ne nous a pas appris, et comme après on se réveille (oh quel bonheur !) même haletant et en sueur, on n'y pense plus…
La Bible dit que Dieu parle, tantôt d'une manière tantôt d'une autre, mais que bien souvent l'homme n'y prend pas garde.
Au nombre de ce qui aurait pu nous interpeler, il y avait aussi des faits survenus dans ces derniers temps. Par exemple arrivés avant l'heure sur un lieu de course, on entrait dans une église ou une petite chapelle. On s'asseyait et immobiles, on attendait comme quelque chose. Elevée dans la tradition catholique, ma femme m'expliquait que la petite lumière rouge dans le fond représentait "la Présence réelle"! Je haussais les épaules! Peut-être, mais encore!? Puis on ressortait comme on était entrés.
On s'était dit que lors d'un reportage dans le midi on irait et on s'arrêterait à Montfavet, pour y voir "le Christ". Mais le Christ de Montfavet ne recevait plus. Sa fille nous avait accueillis, et à la fin sa prière, à (très) haute voix, avait… commencé par nous faire éclater de rire - ce qu'on avait eu toutes les peines du monde à contenir.
Mais lorsqu'on avait repris la route nos yeux s'étaient mis à pleurer, d'une façon tout aussi surprenante qu'émouvante, avec ce sentiment profond d'être touchés à cœur, d'un baume qui coule à l'intérieur pendant que les larmes coulent au dehors.
Puis les courses, notre course, avaient repris à leur allure.
C'est bien plus tard qu'on a appris que personne ne cherche Dieu !... Mais quand on est comme on l'était alors, bien que me disant volontiers athée, attirés vers ce qui est religieux, vers une église, vers le surnaturel ou une spiritualité, c'est qu'il est à l'œuvre, en train de nous chercher, en vue de cette découverte exaltante qu'est une rencontre avec lui. En vue de la révélation surnaturelle à notre âme qu'il est un Dieu vivant!
Mais on était restés dans notre riche et si pauvre condition, dans cette inconscience adamique de réalités bien plus grandes qu'un quotidien bien rempli… mais sans Dieu ! En presque dix ans, nous n'avions jamais pris ne serait-ce qu'une semaine de vacances, et rien que la simple idée de prier, de m'adresser à l'invisible comme s'il y avait bien un Dieu pour m'entendre, ne m'était toujours pas venue à l'idée alors que j'entrais en convalescence!
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